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On remet tout à plat ? Moins de hiérarchie c'est plus de leaders !

  • Photo du rédacteur: Erwan Hernot
    Erwan Hernot
  • il y a 4 jours
  • 5 min de lecture

Structure plate
De la hiérarchie au réseau

Une structure organisationnelle conditionne la manière dont une entreprise coordonne ses équipes, ses processus et sa prise de décision. La structure « plate » réduit au minimum les échelons hiérarchiques : au lieu d’une pyramide traditionnelle avec plusieurs niveaux de management, on diminue (ou supprime parfois) la "couche" intermédiaire. L’objectif est triple : accélérer la prise de décision, responsabiliser les employés et promouvoir une collaboration plus flexible. le prix à payer ? Une mutation nécessaire du manager vers le leader.


Même les organisations qui éliminent ou réduisent leurs échelons, ont au moins une personne (ou un petit groupe) qui oriente la vision globale et veille à l’alignement des équipes. Les groupes, y compris très autonomes, ont besoin d’objectifs communs, d’un cadre pour résoudre les conflits et d’une répartition intelligente des ressources. En pratique, c’est là qu’intervient le leader. Il peut être tournant, ou davantage de type « leader-serviteur », agissant comme un facilitateur plutôt qu’un chef. Il peut aussi s’agir d’un petit cercle gérant la stratégie. Quoi qu’il en soit, un certain leadership est nécessaire car les équipes ont besoin d’une vision d’ensemble et de responsabilités clairement définies. En somme, si les structures plates tendent à confier plus de décisions au terrain et allègent le poids du contrôle « descendant », elles diminuent les managers pour augmenter les leaders : facilitateurs, coachs ou guides qui coordonnent et clarifient, au lieu de donner des directives selon un schéma strictement hiérarchique.


Une structure plate, ça marche ? Le cas le plus souvent mis en avant est celui de Morning Star, une entreprise de transformation de tomates basée en Californie. Depuis des décennies, elle fonctionne en auto-gestion et il n’y a aucune indication d’un retour en arrière ou 2025. L’entreprise se porte bien. Elle est souvent citée dans la littérature managériale pour son approche radicale. Pas de hiérarchie classique, chaque employé négocie, avec ses collègues, la liste de ses responsabilités et de ses objectifs. Tout cela figure dans un « Colleague Letter of Understanding » (« Lettre d’Entente entre Collègues »), de sorte que chacun sache qui est responsable de quoi. Chez Morning Star, chacun gère « sa propre affaire », tout en restant sous l’égide d’une société plus vaste (ou sous la pression du groupe, diront les adversaires de l'approche) : cela motive chaque personne à réduire le gaspillage, à innover dans les procédés de production et à communiquer en toute transparence. Il n’y a pas plusieurs strates de validation : toute personne a l’autorité de changer une machine ou d’améliorer une chaîne de production si elle peut justifier son investissement. Résultat : une résolution des problèmes rapide, un fort sentiment d’appropriation et un moral élevé. Pour autant, Morning Star n’ignore pas la nécessité du leadership. Il se manifeste différemment, sous forme de leaders de projet, parfois informels, qui émergent selon l’expertise ou la motivation. Tous partagent cependant la même mission : produire des produits de haute qualité à base de tomates, de manière innovante et rentable. En cas de conflit, les employés peuvent faire appel à leurs pairs issus d’autres services pour élaborer ensemble une solution. Au final, la bureaucratie y est réduite au minimum. La culture d’entreprise se fonde sur la responsabilité personnelle.


Il reste que tous les exemple ne sont pas aussi concluants. Nombre de multinationales déclarent aplanir leur hiérarchie et encourager l’auto-gestion. Sauf qu'elles ne changent pas pour autant leurs structures de pouvoir ! Dans certaines grandes entreprises agro-alimentaires par exemple, on instaure de nouveaux programmes « d’autonomisation » sans vraiment modifier les niveaux successifs de vice-présidents, directeurs et managers de terrain. Le pouvoir de décision reste finalement entre les mains de la direction et la hiérarchie demeure très présente. Les collaborateurs se rendent vite compte que le passage à la « structure plate » n’est que superficiel : on leur dit « vous avez la liberté de proposer vos idées », mais chacune doit être approuvée par une série de supérieurs hiérarchiques. C'est le royaume de l'injonction contradictoire. L’innovation s’essouffle alors rapidement. Certes, il peut y avoir quelques petits gains (meilleure communication ou utilisation d’outils collaboratifs) mais la répartition réelle du pouvoir reste inchangée. Au fil du temps, les salariés le constatent et ils se désengagent. C’est la leçon de ces pseudo-réformes : afficher une structure « plate » n’est pas suffisant ; il faut donner une marge de manœuvre réelle aux équipes. Il s'agit de mettre en place de nouveaux systèmes de soutien à la fois aux équipes afin qu'elles comprennent et assument la responsabilité qui est maintenant la leur et aux managers qui doivent prendre la mesure de leur nouveau rôle, pour que la prise de décisions décentralisée fonctionne.


Quelles conséquences pour les managers ?  Dans une logique  Command & Control , le manager est clairement identifié : il détient l’autorité, attribue les tâches, évalue les performances et valide l’utilisation des ressources. Dans une structure plate, ses responsabilités changent en profondeur :

  • Moins d’autorité formelle : le manager ne peut plus s’appuyer sur son seul titre. Son influence se gagne désormais par l’expertise, la capacité à fédérer et la persuasion. C’est parfois déstabilisant pour qui est habitué à se faire obéir plutôt qu'à guider.

  • Nouvelles compétences : avec davantage d’autonomie pour l’équipe, il devient essentiel de maîtriser le mentorat, la résolution de conflits ou encore la facilitation. L’objectif est d’aider les équipes à se fixer des buts clairs, à coopérer et à surmonter les obstacles organisationnels. Les compétences relationnelles et la gestion de conflits prennent une place essentielle.

  • Ambiguïté sur le rôle : certains managers craignent de devenir inutiles si l’organisation supprime la plupart des postes de management. Même s’ils conservent un périmètre de responsabilité, la notion de « diriger en contrôlant » disparaît. Il leur faut alors repenser leur identité professionnelle et leur contribution concrète à l’entreprise.

  • Enjeux émotionnels et culturels : Le changement n’est pas que structurel. Les managers qui tirent leur fierté de leur statut hiérarchique se sentent menacés. S’ils ne sont pas formés à évoluer, ils risquent de bloquer le processus et créer des tensions.

La transition vers un modèle plat peut être à la fois libératrice et source d’anxiété. Ceux qui s’adaptent finissent par apprécier le fait de stimuler l’autonomie et l’esprit entrepreneurial. D’autres, en revanche, peinent à trouver leur place et quittent l’entreprise ou, du moins, freinent la mise en œuvre du modèle.


La structure plate, une tendance d’avenir ? Ce n'est déjà pas une idée récente : des penseurs tels que Warren Bennis (1) ou Henry Mintzberg (2) parlent de modèles plus « organiques » depuis longtemps. Mais dans un monde où l’innovation, l’adaptabilité et la créativité sont devenues cruciales, l’intérêt pour les formes de management décentralisées ne fait que croître. Dans de nombreux secteurs (en particulier la technologie, le conseil, la création, et tout ce qui touche à la connaissance), ces approches progressent. Les outils numériques facilitent la collaboration sans passer par toute la chaîne hiérarchique, et les jeunes générations attendent souvent de la souplesse et un minimum de bureaucratie. Toutefois, il ne s’agit pas de tout aplanir sans discernement. Certaines entreprises—en particulier celles qui sont très grandes, internationales, ou opérant dans des industries très régulées—ont encore besoin de structures claires pour se conformer aux exigences légales et de sécurité. Dans l’armée, par exemple, il est essentiel de maintenir un certain « commandement ». On peut donc imaginer que l’avenir est plutôt à un modèle hybride, mêlant un minimum de hiérarchie (pour la stratégie, la conformité, la sécurité) et une plus grande autonomie pour les équipes.



Erwan Hernot, associé ClavaConsulting, membre de ScoRH



(1) Warren Bennis, 2005, Reinventing Leadership: Strategies to Empower the Organization

(2) Henry Mintzberg, 1983, Structure in Fives: Designing Effective Organizations 

 
 
 

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